J'en ai bu un verre ce midi, Raymond !

... comme presque chaque midi, d'ailleurs.

Même que c'était du Pinot,

Noir...

Un seul remède, Raymond !

Comment ? T'as pas la télé ? Ben heureusement que j'suis là !

Mouarf, Raymond, tu parles comme un institut de sondage, mon pauvre vieux !

Prévisionniste à la noix, va !

Pourtant, Maurois, ton contemporain, t'avait prévenu : "Toujours l'inattendu arrive !"

Aujourd'hui, justement, faut bien chercher pour en trouver un peu Raymond !

Heureusement qu'il y a celle de la tasse de café du petit-déjeuner.

Et encore... moi, je bois du thé

Vert !

(Une couleur froide)

... et sur la voie publique de surcroît !

Ton histoire où le garde-champêtre verbalise pour ce fait le cantonnier local est un peu en porte à faux, Raymond !

Aujourd'hui je ne sais pas participer parce que je suis belge, Raymond !

Si j'étais français, j'aurais dit "Je ne peux pas"

Tu comprends ?

Là, tu tombes bien Raymond, raconter des sacs, c'est ma spécialité !

Dans l'idiome local, je suis un zakkenopgeiver*

* chargeur de sacs : menteur

Celle pour mettre au trou évidemment, Raymond !

Mais comment diable as-tu eu vent de ma réputation ("Il a toudi en' piece pou met' au trau") ?

Ah Raymond, tu vas pas nous la jouer syndicaliste aujourd'hui ?

Tous ensemble, tous ensemble, ouais, ouais !

Je suis un compatriote de Jacques, moi !

Tu sais bien :

On est deux à vieillir
Contre le temps qui cogne
Mais lorsqu'on voit venir
En riant la charogne,
On se retrouve seul !

(même si on va bien ensemble)

T'es un rêveur finalement...

Ah, si je t'avais connu plus tôt Raymond, j'en aurais eu des choses à dire !

Mais là, il s'agit bien d'aujourd'hui et le mois prochain, ça fera treize ans que j'aurai pris ma retraite.

Dommage, car mes souvenirs sont encore vifs...